Dépression ou lucidité ?

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azuriel
Messages : 12
Enregistré le : lundi 06 février 2023 22:34

Dépression ou lucidité ?

Message par azuriel »

J'ai 48 ans et je suis en dépression depuis mes 17 ans.
Ça fait si longtemps que je suis dans ce tunnel que j'ai l'impression de ne plus comprendre quoique ce soit.
La dépression vous pousse à chercher des réponses parfois philosophiques et Internet m'a conduit naturellement dans les années 2000 à des philosophes/écrivains comme Schopenhauer ou Cioran. Je résume et simplifie grandement mais au cœur de leurs philosophies se trouve l'idée qu'il ne vaudrait mieux ne pas être né.
Lorsqu'on est en dépression, cette idée vous marque au fer rouge, votre cerveau vous dit de sa voix la plus convaincante "Ils ont raison ! Vivre n'est que de la souffrance". Quand bien même d'autres philosophes n'arrivent pas à la même conclusion. Quand bien même ces philosophes ne professaient même pas le suicide, mais proposaient des solutions pour vivre le mieux possible. Malheureusement, de deux idées, votre dépression vous fait toujours choisir la plus noire, car elle vous parait la plus en résonance avec votre malheur. Vous avez beau rationaliser, vos "tripes" vous disent que la vie est un cauchemar et que votre dépression n'est pas une maladie mais juste une trop grand lucidité, et les exemples ne manquent pas autour de vous pour aller dans ce sens : guerres, massacres, traitement des animaux, maladies (Alzheimer notamment), absurdité de la vie, etc.
Je suis constamment en lutte, une partie de moi cherche désespérément à contrer l'autre partie de moi qui est convaincue qu'il y a toutes les raisons du monde pour considérer la vie et la conscience comme un affreux accident de l'univers, du coup, je suis parfois dans une posture de provocation vis-à-vis des gens autour de moi car je meure d'envie qu'ils me **prouvent** que la partie sombre de moi à tord. Mais ça ne marche pas, comme si on pouvait "prouver" que la vie vaut le coup d'être vécue... et de plus, au bout d'un moment, lorsque vous dites à votre moitié ou vos amis que la vie n'est que souffrance en espérant de façon pervers qu'ils vous démontrent le contraire, et bien... bah les gens vous fuient hein, c'est normal.
Malheureusement, ce que chez beaucoup de monde ces questionnements philosophiques sont "en fond" de leur existence, chez moi, ça me met dans un état de prostration mental, je ne veux plus rien expérimenter, plus rien créer, plus rien faire car ... "à quoi bon ? Tout se termine de toute façon, tout meure". J'ai l'impression que soit mon esprit, soit ma dépression me met dans une quête d'absolu qu'il est impossible de satisfaire, sauf peut-être à être frappé par la grâce divine :smile:
Tout cela pour dire que je ne sais finalement pas si je suis en dépression. Cliniquement, j'ai été diagnostiqué, j'ai fait 8 mois dans une clinique, on a tenté des ECT qui ont dû être interrompus pour raison de risque de santé, j'ai eu des sessions d'EMTS, j'ai le même traitement antidep+anxio depuis des années et je suis toujours dans ce même état de détresse psychologique dû au fait que je suis "convaincu" qu'il vaudrait mieux mourir et que ça ne sert à rien de faire quoique ce soit dans ce monde.
Si j'écris ce post, c'est comme une bouteille à la mer, je préfère écrire ici que dans un journal que personne ne lira jamais.
Bon courage à toutes et tous
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azuriel
Messages : 12
Enregistré le : lundi 06 février 2023 22:34

Dépression ou lucidité ?

Message par azuriel »

Vous savez, les lendemains de cuite, si ça vous est déjà arrivé, ou bien une bonne gastro, vous savez que vous allez vomir, que vous DEVEZ vomir mais vous reculez ce moment au maximum en vous disant que vous arriverez bien à faire passer la nausée, mais au bout d'un moment, vous prenez votre courage à deux et une bassine et vous vous soulagez ? Je ressens un peu la même chose avec mes nausées existentielles, j'ai des moments d'intenses nausées où je sens en moi qu'il faudrait que je mette fin à mes jours, mais je recule au maximum ce moment en pensant (naïvement sûrement) que ça va passer, mais ça revient ensuite, au détour d'une pensée, d'une lecture, d'une constatation que l'existence c'est l'enfer, puis vous repoussez à nouveau cette idée fatale....

Je sais que la source de mes souffrances psychiques actuelles, c'est mon refus de me laisser m'illusionner sur la vie, toujours la même histoire de pilule verte ou rouge, j'ai l'impression qu'une partie de mon cerveau préfère agoniser devant le spectacle aveugle et insensé de l'univers plutôt que d'adopter une vision, certes faussée (selon moi, même si je sais que c'est une affirmation très arrogante) de la vie mais qui me permettrait de vivre plus sereinement. Pourquoi je choisis ça ? Pourquoi je m'inflige ça ? Pourquoi mon cerveau ne trouve aucune spiritualité, aucun baume au cœur, même illusoire et préfère me torturer ? C'est comme si je gardais un infime espoir tordu de trouver une raison rationnelle qui me permettrait de souffler.

Internet est une caisse de résonance dangereuse, vous trouverez toujours des avis qui vont dans le sens le plus pessimiste qui vous traverse l'esprit, et votre dépression/façon de voir la vie vous rétorquera toujours "ah tu vois ? D'autres sont d'accords, ce sont les dépressifs qui ont raison, les gens "normaux" sont juste dans l'illusion".

Mais M.... ! Je crie au ciel de me dire que j'ai pas raison, que les gens normaux ONT raison, peu importe s'ils croient des choses fausses ou bien qu'ils décident de ne pas y penser, au moins ils vivent ! Ils ne sont certes pas toujours heureux mais ils vivent. Ils ne sont pas constamment en train de se dire "de toute façon, ça va disparaître" à la moindre action, au moindre épisode de série, à la moindre promenade. Ils y pensent parfois, mais pas CONSTAMMENT.
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azuriel
Messages : 12
Enregistré le : lundi 06 février 2023 22:34

Dépression ou lucidité ?

Message par azuriel »

J'ai reçu le livre "Guérir de la dépression: Les nuits de l'âme" conseillé par d'autres forumeurs. J'ai besoin de me rattacher à des points de vue rationnels et cliniques sur la dépression, pour ne pas devenir fou et croire mon "petit singe mental" qui me dit que je ne suis pas malade. J'espère que je suis malade. Si je suis malade alors ça expliquerait en partie mon état. Si je ne suis pas malade alors je suis trop "sensible" pour ce monde dont je n'accepte pas les règles, surtout les règles de l'impermanence des choses. Qu'y-a-t-il de permanent dans ce monde, à part l'impermanence ? Est-ce que l'Amour doit guider mes pas ?

J'ai l'impression que je dois faire le deuil de retrouver le garçon que j'étais à 17 ans (juste avant ma première dépression), plein de confiance envers la vie et optimiste, il est fort probable que la pensée pessimiste que j'ai lu chez certains philosophes me marque à jamais, par contre, ce sentiment horrible que je porte toute la journée de vouloir mourir, j'espère que j'arriverai au moins à m'en départir un jour, devenir moins sensible à toute la souffrance de l'univers que je ressens et toute l'anxiété.
B
Burbouk
Messages : 1
Enregistré le : jeudi 26 septembre 2024 14:02

Dépression ou lucidité ?

Message par Burbouk »

Bonjour, sachez que votre bouteille à la mer a trouvé destinataire(s). Je me fais la même réflexion vis à vis d'une probable lucidité dont on peut jouir lorsque l'on a le moral dans les chaussettes. Je suis actuellement un mois après mon traitement antidépresseur et après une traversée du désert pavées de multitudes maux physiques, cognitifs et psychiques, je me sens doucement vivre de nouveau.

Comment jauger de ce bien être retrouvé ? Tout d'abord très concrètement mon sommeil, mon appétit, ma libido, mes envies ou mes facultés mentales semblent rentrer dans un ordre que je qualifierais de compatible avec la vie "normale" que vous définissez si bien.

Un peu moins concrètement je dirais que je me sens mieux car j'arrive de nouveau à me dissocier de moi-même c'est à dire que mes pensées ne tournent pas exclusivement sur ma personne, mon ressenti ou mes peurs. J'arrive timidement mieux à extérioriser ma pensée sur les autres et l’extérieur. Je pense que ce dernier aspect est intéressant sur le plan philosophique car si le mal qui nous accable vis à vis de l'absurdité de la vie est réel, rien ne justifie (il me semble) cette obsession auto-centrée car les informations émanant du monde extérieur sont tout aussi légitimes pour comprendre le monde. Cela pourrait prouver qu'il y a un dysfonctionnement avéré issu des pièges tendu par la dépression. En d'autres termes, même si les questions relatives aux souffrances de l'existence sont légitimes, vouloir y répondre avec les facultés d'un individu déprimé semble dérisoire. Je conçois que l'appréhension de cette réflexion est difficile si cela fait longtemps que l'on est plongé dans la "noirceur" du tunnel.

Ma rémission étant encore au stade de balbutiement, je vous confie néanmoins que je souffre d'une certaine stupeur, de choc post-dépression bien réel. Bien que de nombreux symptômes se soient calmés, j'ai toujours une certaine appréhension sourde vis à vis de la réalité qui m'entoure. D'une peur vis à vis d'un vide existentiel qui puisse me frapper sans crier gare. Mais contrairement au début ou je n'avais ni la force physique, moral et cognitive à bouger, maintenant je peux envisager ne serais-ce que quelques dizaines de minute à ne pas penser à ces fatalités et autres absolus.

Monsieur, votre bouteille à la mer tombe à point nommé pour moi et je vous en remercie. Vous avez confirmé certaines de mes appréhensions par vos mots, j'espère que vous avez pu avancé sur certains points ou du moins trouvé la force de mettre une distance vis à vis de ces tambourinements mentaux. J'espère ne pas avoir eu l'air trop condescendant dans mes mots, mon but est comme le votre de pouvoir extérioriser mes pensées en dehors de mon carnet.
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